Autres textes de cinéma de 181 à 190

 

Un festival, encore un ? Et puis quel sens d'en lancer en période de pandémie ? Des festivals, il n'y en aura jamais assez en permettant de faire circuler les films et leur visibilité, ceux qui nous tiennent à cœur, films autres, productions minoritaires, gestes singuliers du cinéma contraire dès lors que le festival a pour ambition de ne pas se cantonner au jeu confiné des mondanités culturelles et des festivités événementielles.

 

 

Certains liront vite Une certaine tendance du cinéma documentaire en y reconnaissant seulement le plaidoyer pro domo d’un réalisateur piqué au vif que son dernier film n’ait pas été retenu par un festival de cinéma. D’autres prendront davantage leur temps en y voyant un nouveau texte d’intervention dédié à la défense inlassable de la part documentaire du cinéma en tant qu’elle protège nos sensibilités des obscénités du marché des visibilités intégrales dont le spectacle global est une atteinte à notre dignité, une offense faite à notre humanité.

 

 

En dépit de son petit côté sautetien (« Serge Daney, l'Afrique et les autres... »), l'intitulé des deux tables rondes organisées lors des Rencontres Cinématographiques de Béjaïa en 2014 et consacrées à la figure de Serge Daney était ambitieux. Une ambition affirmée par Samir Ardjoum, critique et journaliste qui occupait alors les fonctions de programmateur et de directeur artistique des RCB.

 

 

O Ka est le dernier film en date de Souleymane Cissé, immense cinéaste malien relégué dans les strapontins des festivals internationaux. Le film est beau en étant rigoureusement fidèle à son titre : c’est une maison faite en étagement et les quatre sœurs du cinéaste en tiennent les murs autant que ses piliers. Comme le film qui raconte leur combat contre l'expulsion est un documentaire qui se soutient aussi d’une histoire longue de cinéma venant en relais du rayonnement de mythes millénaires.

 

 

Le généalogiste angoisse de ne pas assurer les liaisons dans le roman familial. Il angoisse encore de n’être ni un bon père, ni un bon fils, ni un bon ciné-fils. Le généalogiste angoisse tant qu’il ne sait pas quoi faire des autres histoires qui tambourinent à la porte de ses plans.

 

 

Voir importe quand un regard porte la perception du savoir en ce qu'il y a d'impouvoir dans le fait même de voir. Voir peu n'est qu'un moment d'un processus de focalisation, amorcé faiblement du côté de l'œil, décisivement prolongé du côté de l'oreille. Bientôt on va voir. Pas beaucoup plus, mais un peu mieux. Du visible au réel, il faut une oreille pour voir ce qu'offusque le visible.

 

 

Guy Gilles, cinéaste longtemps méconnu au point d'avoir été relégué dans les marges de la Nouvelle Vague, a pourtant beaucoup travaillé, et avec quelle intensité. L’œuvre n’en reste pas moins placée sous l'emprise d'un désœuvrement qui, entre nostalgie d’un passé mythifié et mélancolie d’un présent qui n’arrête pas de couler, aura nourri comme hantise ultime celle du temps perdu dont la perte se consomme au présent des souvenirs qui font mal au ventre en faisant tourner la tête.

 

 

Il y a des revues de cinéma dont l’excellence consiste à ce que l’amour des films témoigne dans la persévérance du sens critique des mutations de l’art auquel elles se consacrent. Et puis il y a les Cahiers du cinéma dont l’histoire a bouleversé celle du 7ème art. La revue de cinéma la plus mythique de l’histoire du cinéma constitue en soi une histoire de cinéma qui dure depuis 70 ans. Le temps des anniversaires est celui des retours en arrière, ainsi que des retours au présent mélancolique quand l'histoire l'emporte en intempestivité et en force critique sur l'actualité.

 

 

Théâtre des opérations militaire et terrain de jeu enfantin, creux et bosses, bulldozer et dinosaure, agitation industrielle et profondeur archéologique, information câblée et métaphores osées : la circulation moléculaire des signes échangés comme on se passe un ballon est ce qui autorise Apichatpong Weerasethakul à voir au-delà d'une visibilité assujettie aux seules formes molaires du pouvoir militaire.

 

 

Toute révolution est un coup de dés a besoin de quoi ? Un site chargé d'histoire, neuf personnes vivantes, un texte. C'est ainsi qu'il évalue le devenir spectral de la Révolution, cryptique comme un poème vivant malgré les cryptes de pierre du cimetière. Jean-Marie Straub et Danièle Huillet en ont besoin au moment où la lucidité politique leur a permis de voir que la promesse révolutionnaire était alors en train de perdre sa consistance et son urgence.