Juste avant de nous envoler pour les Rencontres cinématographiques de Béjaïa, et pour cette onzième newsletter des nouvelles du front cinématographique (site et page facebook), nous soumettons à votre lecture les textes suivants :
1) En premier lieu, la deuxième partie de notre analyse des blockbusters du printemps dernier et de l'été,
toujours dans la rubrique des "Nouvelles du front cinématographique".
En attendant la sortie du prochain épisode de la saga Star Wars 7 : The Force
Awakens de J. J. Abrams, suivons-nous avec Ant-man, Fantastic Four et
Mission Impossible 5 : Rogue Nation les infimes galeries construites sous le sol (qui ressemble toujours plus à un cimetière)
des éléphants hollywoodiens par
quelques rares termites moins au service du tiroir-caisse que du cinéma. La première partie est toujours disponible ici.
2)
Dans la catégorie des "Autres textes de
cinéma", nous analysons l'insolent court-métrage Haramiste de Antoine Desrosières où deux jeunes frangines voilées, telles deux cousines moins rohmériennes qu'eustachiennes, se
servent du langage comme d'un moyen poétique et pragmatique de transgression des attendus objectivement ou subjectivement associés à leur pratique religieuse.
Pour information, nous animerons une discussion en présence du réalisateur et des
deux actrices du film au cinéma L'Accattone, 20 rue Cujas, Paris 5ème, lundi 31 août, à 20h15.
Aussi, avec notre lecture du dernier ouvrage de Jean-Louis Comolli, Cinéma, mode d'emploi, nous nous attacherons à démontrer comment l'auteur, cinéaste et théoricien pense la situation actuelle du
cinéma (documentaire en particulier - mais le documentaire soutient, on le sait, une vérité générique propre à tout l'art du cinéma) à l'intersection de l'héritage bazinien du réalisme
ontologique de l'image cinématographique d'un côté et de l'autre des nouveaux développements technologiques et numériques affectant la production des films.
3
) Nous proposons également de continuer dans la
catégorie "Champ contre champ" notre intégrale
imaginaire consacrée à John Carpenter. Avec cette quatrième et dernière partie, nous
évoquerons entre autres Vampires et Ghosts of Mars, mais aussi ses
dernières réalisations pour le moins méconnues (deux épisodes de la série Masters of Horror et l'inédit The Ward). Des films plus ou moins malheureux démontrant le sort injuste affectant aujourd'hui l'un des derniers mavericks de Hollywood.
4) Dans notre catégorie intitulée "
La
séquence du moment", nous nous sommes attaché-e-s à créer une
playlist des meilleurs sketchs (en Version Originale) du duo comique américain Tim Heidecker et Eric Wareheim, des satires plutôt
crues et assez déjantées du consumérisme par le biais de publicités vantant les mérites de marchandises aussi improbables et que symptomatiques de la bêtise capitaliste.
5) Dans la catégorie "
Le bon plan du mois",
Les Oiseaux de Alfred Hitchcock refont une apparition fracassante. La presse
tabloïd nous avertit de faire attention aux goélands, il semblerait qu'ils se soient inspirés du classique ressorti récemment en
copie numérique flambant neuve.
7) Enfin, notre sélection musicale mensuelle fait une dernière escale dans les musiques des films de John Carpenter (Vampires), passe par le thème électro composé par Tangerine Dream pour le film Sorcerer de William Friedkin (ressorti récemment sur les écrans), une création de Panpan Master/Fujiko, à partir d'une séquence de Cruising du même réalisateur et s'envole avec les accents électro-hindous de Morning
side de Four Tet. Une fois n'est pas coutume, nous vous proposons un sketch de Jim Carrey en dragueur du vendredi soir sur le tube de Haddaway, What is Love.
Intéressé-e-s par quelques chiens au cinéma, nous avons également monté une seconde playlist où les aboiements canins se substituent aux cris des goélands :
des Beatles aux Beach Boys, de Pink Floyd à David Bowie en passant par Daniel Johnston, demain les chiens seront partout !
Bientôt le mois de novembre et c'est l'occasion de cette treizième newsletter
des Nouvelles du Front cinématographique (site et page facebook), avec les propositions suivantes :
1) En premier lieu, dans la rubrique des "Nouvelles du front cinématographique", nous présentons la première partie de notre analyse en trois volumes consacrée aux films du
cinéaste libanais Ghassan Salhab (partie
1). De Beyrouth
fantôme à son avant dernier long-métrage, La Montagne, et dans l'attente de La Vallée son prochain film annoncé, nous nous serons perdus avec lui dans
les rues de Beyrouth, y rencontrant de fascinants monstres, des revenants, des prêtresses, des vampires aussi. La cité qui promet à ceux qui l'habitent les ensorcellements du faux-mouvement
est aussi la capitale de la douleur dont les cicatrices ne cessent d'indiquer le composé labyrinthique des différentes strates de temps en formant l'archéologie. Nous aurons enfin fait la
rencontre d'un geste cinématographique préoccupé de mobiliser les ressources esthétiques de la modernité afin de proposer à notre sensibilité la nécessité de relever, au moins poétiquement,
la somme de divisions dont son auteur est couturé.
2) Dans la catégorie des "Autres textes de cinéma",
nous aurons regardé le nouveau court-métrage de Yassine Qnia, F430, petite mécanique à la
précision imparable qui fait entendre dans les rues d'Aubervilliers, mieux que la ritournelle des calculs égoïstes, le cluster d'une fièvre incendiaire : celle qui s'empare du garçon désœuvré qui voulait joyeusement en abolir le cercle au nom de la pure
dépense, solaire et somptuaire, improductive.
C'est alors l'excellente occasion pour vous annoncer la programmation de F430 au 104, le cinéma municipal de Pantin, jeudi 19 novembre à 20h15, lors d'une soirée consacrée à Yassine Qnia à l'issue de la 3ème
édition des journées professionnelles organisées par « Cinémas
93 »,l'association des cinémas publics du département francilien.
3) Dans notre catégorie intitulée "La séquence du moment" et en hommage à la réalisatrice belge Chantal Akerman, nous avons eu envie de revoir son premier
court-métrage, Saute ma ville, où elle s'ingéniait à saper avec une sauvagerie burlesque et enfantine les fondations d'une existence
étriquée, avant de fermer ses yeux verts et finir par s'endormir, déjà, passée de l'autre côté du miroir.
4) Cela fait par ailleurs un moment que nous suivons le travail du metteur en scène Olivier Coulon-Jablonka. Une
lecture de sa dernière pièce, 81 avenue Victor Hugo, reprise au début de l'automne au Théâtre de la Commune à Aubervilliers est disponible dans notre
section « front social et le reste ». Les
citations à comparaître y sont huit fois incarnées mais elles relèvent ici des puissances propres à la comparution théâtrale en ce qu'elles se distinguent et même désactivent la comparution
judiciaire. En supplément, un texte rappelle que le metteur en scène entouré des membres de sa troupe du Moukden-Théâtre avait proposé au Blanc-Mesnil un passionnant Petit
Mahagonny.
D'une part, c'est une sélection hétérogène qui
démarre avec les accords polaires d'Ennio Morricone pour un film de John Carpenter, continue avec les chants de Hope Sandoval hantant les allées du cirque paradisiaque de Massive Attack,
passe par l'insolite reprise d'un hit de Metallica par une chorale féminine belge, repasse par des chants bulgares traditionnels entendus dans Rencontres au bout du monde de Werner Herzog pour enfin se conclure sur l'inusable Cinnamon Girl de Neil Young.
D'autre part, une playlist consacrée aux musiques
entendues dans les films de notre cinéaste libanais du mois viendrait prouver que la vision de ces films n'aura pas été seulement rêvée.
Dans quelques jours, notre site fêtera sa première année.
Nous vous remercions pour vos nombreux retours encourageants et constructifs, gages qu'il nous faut continuer dans
cette voie d'un partage du cinéma, l'un de nos biens communs parmi les plus précieux.
C'est dans cet esprit que nous vous proposons donc cette quatorzième newsletter des Nouvelles du Front cinématographique (site et page facebook), avec les interventions suivantes.
1) En premier lieu, dans la rubrique des "Nouvelles du front
cinématographique", nous présentons la deuxième partie de notre analyse en trois parties consacrée à l'œuvre du cinéaste libanais Ghassan Salhab (partie
2). Il sera encore et toujours question de Beyrouth comme citadelle autant de fois assassinée que ressuscitée, de
quelques-uns de ses survivants ou morts-vivants qui flottent dans l'intermonde spectral où persiste en fondu-enchaîné le monde d'avant et peine à s'imposer celui qui vient, mais aussi du
réalisateur lui-même offrant son corps en guise de siège aux éclats d'une interrogation élargie aux forces matérielles et cosmiques dont il est entre mille autres divisions le dépositaire, y
compris face à Jean-Luc Godard à l'occasion d'un bel entretien (la première partie reste évidemment toujours disponible ici).
2) Dans la catégorie des "Autres textes de
cinéma", les Zombies d'un film secrètement comploté par Élisabeth Perceval et Nicolas Klotz nous
auront assaillis d'énigmes à résoudre, dans la crypte de notre nuit habitée de plusieurs fantômes artistiques et historiques, comme des esprits revenus des limbes de la fin de l'histoire
en quête d'incarnation - d'une réincarnation de la politique au lieu même des disjonctions nihilistes de l'idéologie.
3) Dans notre catégorie intitulée "La séquence du moment", il nous fallait nous rappeler La Comédie de Dieu du grand Joao Cesar Monteiro et convoquer son esprit - celui de la grande santé et du oui - afin de remédier un tant soit peu aux
ravages des maladies du temps coincé dans les mâchoires des totalitarismes rivaux et mimétiques, marchand et religieux, tous fanatiques.
4) Dans la catégorie "bon plan du mois", Falstaff de Orson Welles s'est imposé à
nous comme le gros nounours revenu de notre enfance, cette enfance sur laquelle il ne faut pas céder comme il ne faut pas céder sur le cinéma, l'enfance et le cinéma en ce qu'ils
misent sur les puissances ludiques du faux en préférence au théâtre sérieux du pouvoir (définitivement le signe de la trahison et de la puissance et de l'enfance).
5) Dans notre section « front social et le reste », une exposition nomade s'est à Paris installée : Metaphora
de l'artiste Bruno Hadjih à la galerie Mamia Bretesche, avec des photographies qui se regardent par deux, à côté ou en
vis-à-vis, afin de voir réciproquement
glisser les plaques tectoniques du visage et du paysage, et retenir aussi la lumière fossile
qui brille en nous pour la réverbérer en transfigurant la nuit de la désertification du monde : ces images polaires et magnétiques, elles nous regardent autant qu'on les voie, elles
n'oublient pas non plus que le désastre aura nommé aussi le tout premier, la séparation native fondatrice avec l'étoile - Big Bang - d'où nous fûmes nés.
6) Enfin, notre sélection musicale
mensuelle, avec son petit orgue de Bach et ses drôles de reprises
(Joy Division en bossanova et Simon & Garfunkel par Mark Kozelek), les ritournelles électroniques de Richard D. James et les mélopées country et édéniques de l'ancien fumeur de Smog,
Bill Callahan (l'homonyme du policier dirty).
En vous souhaitant à toutes et tous beaucoup, et déjà de bonnes lectures
!
L'année 2015 aura été particulièrement terrible, nous
obligeant – nous y sommes forcé-e-s dès lors que
l'obligation se comprend ici comme une force – de continuer à travailler en persévérant
dans un irrémédiable effort de pensée. Un effort qui passe entre autres mais forcément aussi par le
cinéma tel qu'il nous retient, tel qu'il nous tient en nous retenant – nous sommes contraint-e-s à une telle retenue – de plier en cédant devant les
figures brutales ou molles d'un même nihilisme contemporain (les terroristes comme idiots utiles de l'extrême-droite).
C'est dans la conscience vive de ce contexte que nous vous proposons
nos textes en vous remerciant une nouvelle fois pour vos amicales relances, vous
invitant en cette fin d'année à lire notre
quinzième newsletter des Nouvelles du Front cinématographique (site et page facebook).
1) Tout d'abord, dans la rubrique des "Nouvelles du front cinématographique", voici le temps venu de la troisième et dernière partie de notre analyse portant sur le travail de Ghassan
Salhab (partie 3). Beyrouth y représentera
moins l'incontournable labyrinthe où errer en la compagnie posthume de figures sur-impressionnées par des guerres fondues-enchaînées. Le cinéaste libanais
en effet, et selon un motif privilégié, tourne le dos à la capitale pour tracer stratégiquement d'essentielles tangentes qui l'autorisent à
retrouver l'humeur océanique d'une enfance sénégalaise perdue, puis l'invitent à se confronter à la montagne où, du noir au blanc décisivement, se joue contre la passion du néant la tentation
d'un peu d'écriture. La nébulosité des traces préférée à la pulsion de faire place nette, en attendant le bonheur d'une vallée promise en mars
prochain...
2) Dans la rubrique des "Autres textes de cinéma", le nouveau film de Nurith Aviv, Poétique du cerveau, avère chez la documentariste le nouage privilégié de la durée courte (une heure) et de la
densité impressionnante (le film est promis comme l'avenir à durer longtemps), multipliant les entrées dans cette Rome qu'est notre cerveau, tel un éventail miroitant. Avec le battement de ses
plis et replis, respire la vitalité de toute l'œuvre pour la relancer deux fois très loin, une fois en amont (le film est une émouvante lettre morte envoyée à sa mère) et l'autre fois en aval (le film est une profonde investigation des
inflexions chiasmatiques du plus beau temps qui soit, le futur antérieur, celui qui promet au passé un avenir).
3) Dans cette
autre rubrique intitulée "La séquence du moment", le finale du Pont des Arts d'Eugène Green se sera mystérieusement imposé. Comme si le Lamento della
ninfa de Claudio Monteverdi, dans les blessures fatales de l'interprétation et les relèves hasardeuses de la destination,
était par-dessus des eaux létales un pont branlant mais tenant bon. Un pont tenant lieu à notre persévérance de ne pas couler sous le plomb fondu, tantôt d'explosions à mèche vive, tantôt
d'implosions à mèche lente.
4) Dans la catégorie "champ contre
champ", Star Wars, VII : The Force Awakens sera moins l'objet d'une discussion, déjà nourrie ailleurs, sur la nouvelle offensive commerciale et spectaculaire d'une
industrie franchement à bout de souffle à force de sucer tout le jus de ses franchises. Le réel effort de J. J. Abrams aura consisté, outre à satisfaire le tiroir-caisse de Disney entre-temps devenu nouveau
propriétaire du joujou, à offrir aussi le reste d'un point de vue sur les fondements mythologiques du space opera. Une saga dont la relance ne s'autorise que d'une réflexion des ruines laissées derrière lui (acteurs vieillis compris) par George Lucas comme d'une mise en crise
d'un ordre chevaleresque peut-être enfin perçu comme le problème idéologique plutôt que sa solution héroïque.
5) D'autres textes demeurent toujours accessibles : Orson Welles en père Noël mal léché et Joao Cesar Monteiro en figure d'un dandysme mine de rien antifasciste, une exposition de photographies brûlées des sels de la lumière fossile originelle de Bruno Hadjih et le souvenir d'une belle représentation
blanc-mesniloise du Petit Mahagonny de Brecht, d'increvables zombies chez Nicolas Klotz et Élisabeth Perceval et la preuve par
trois des contradictions de Victor Hugo l'écrivain tout autant que
le symbole républicain.
On s'autorisera à proposer dans la foulée la lecture ou relecture d'une critique de La Désintégration de Philippe Faucon, film fétichisé par une partie de la critique sous couvert d'une alerte lancée il y a quelques années par la vigilance d'un
réalisateur sous-estimé. Il semblerait pourtant que les questions y soient pas très bien posées, autrement dit posées de telle manière qu'elles évitent de se poser les autres (l'intégration est
moins la solution républicaine à la désintégration fanatique que le problème même d'une République en ses impensés coloniaux).
6) Enfin, notre sélection musicale mensuelle commencera à se
faufiler avec les mouvements reptiliens de Joy Division pour finir par sautiller avec la pop alerte de Vampire Weekend, tandis qu'un bon vieux John Williams de circonstance sera surveillé de près
par deux bêtes sauvages, un tigre d'un côté (ce sont les feulements du samouraï RZA) et de l'autre une chienne (c'est ce trésor pirate d'un lamento trouvé dans ces îles mystérieuses chères à F. J. Ossang).
Le printemps s'entête à rester frileux mais il est promis que les beaux jours reviendront. En guise de bien modeste hirondelle, voici venu le temps de la 18ème newsletter des Nouvelles du front (site et
page facebook) :
1) Dans notre catégorie des "Nouvelles du front
cinématographique", il s'agira de faire la part belle au genre de la comédie musicale en ses expressions canoniques - autrement dit hollywoodiennes. C'est qu'il s'agit peut-être, contres les
forces obscures s'acharnant à diminuer nos puissances de sentir, de penser et d'agir, de (réapprendre à) chanter et danser. C'est qu'avec la première partie d'un diptyque consacré à la comédie musicale hollywoodienne, il s'agira entre autres de renouer avec une histoire de
quelques grandes formes (du constructivisme de Busby Berkeley au colorisme pictural et onirique de Vincente Minnelli) et de quelques corps privilégiés (de l'aristocrate Fred Astaire à Gene Kelly
le prolétaire en passant par Ginger Rogers puis Cyd Charisse) qui auront su extraire depuis la pesanteur nécessaire des studios quelques éclats de poétisation du quotidien comme de légèreté
éternelle parmi les plus mémorables du cinéma.
2) Pour ce qui relève de notre section dite "Le plan du mois", l'impératif aura consisté à y exposer l'extraordinaire
visage d'Arielle Holmes, sylphide urbaine à l’œil cyclopéen tel qu'il transperce notre regard jusqu'au cœur, Ariel de notre temps à qui le
film des frères Josh et Benny Safdie, Mad Love in New York, aura permis de passer de l'autre côté du miroir de la fiction en
jouant autour d'un feu terrible qui avait jusque-là brûlé plus d'une fois ses ailes.
3) "La séquence du moment" nous proposera quant à elle de faire voir et donner à entendre, depuis la séquence d'ouverture d'un remake de
Nosferatu longtemps mésestimé de Werner Herzog, l'immémorial d'un cri qui dure en traversant les âges, l'inoubliable cri inaudible
et pourtant déchirant des peuples disparus et dont la disparition sans fin est ce dont, intempestivement comme par destin, nous savons devoir hériter.
4) S'agissant encore de la rubrique "Autres textes de
cinéma", nous voudrions discuter du dernier film de Philippe Faucon, Fatima, afin de rendre problématique le sol sur lequel, aussi fin et sensible soit-il, le film se tient, posté à l'un des bouts du
triste consensus actuel dont l'autre pendant complémentaire serait représenté par Dheepan de Jacques Audiard (qui aura droit à sa
propre recension critique lors d'une prochaine livraison des Nouvelles du front). Faudrait-il donc vraiment que les mères rasent les murs en étant doublement assignées à résidence (de la
domination sociale ou d'une affiliation linguistique) afin de rattraper les excès de leurs enfants ne méritant seulement que le grand nettoyage perpétré par un tigre tamoul qu'il n'aurait pas
fallu réveiller ?
5) Dans la rubrique "des nouvelles du front social et du
reste", il nous a paru impérativement catégorique, d'autant plus au lendemain des attentats récemment perpétrés en Belgique, d'essayer de penser la série des attentats parisiens et dionysiens
de janvier et novembre 2015 par le truchement de trois lectures croisées : Quelques réflexions blasphématoires. Islam et modernité de Slavoj Zizek, Le Mal vient de plus loin. Penser les
tueries du 13 novembre de Alain Badiou et Capitalisme et djihadisme. Un guerre de religion de Michel Surya. Il nous faudra ici
tenter de comprendre comment la tenaille mortelle du fondamentalisme de marché et du terrorisme djihadiste fomentent l'éclipse obscure d'une politique authentique et partagée de l'émancipation et
de l'égalité, et comment sa difficile réactivation demeure en nos temps de détresse un viatique afin de sauter hors du rang des assassins qui se font face.
6) Danser, on l'a dit pour tenter de renouer avec un peu de légèreté. Mais il nous faut aussi de la musique, mais il nous faut enfin chanter : c'est pourquoi notre nouvelle "sélection musicale" pose d'en passer par la vibrante mélancolie de Portishead, avant d'être entortillé autour des boucles mortifères de
la Danse Macabre de Camille Saint Saens via La Règle du jeu
de Jean Renoir, jusqu'à ce que les nappes planantes de Tortoise, puis les embrouillaminis
psychédéliques de James Dashow embrumant le film des frères Safdie, et enfin les chaloupés sénégalo-québécois de Bran Van 3000 réussissent à requinquer pour la journée et même celle(s) d'après.
Face aux froidures persistantes d'un mois d'avril en signe de printemps tardif, s'offrira, chaleureusement, notre 19ème
newsletter
(
site et
facebook).
Dans la catégorie des
nouvelles du front cinématographique, nous proposons de continuer nos
variations autour du
musical en demandant cette fois-ci à l'un de ses chefs-d'œuvre emblématiques,
Bandwagon - Tous en scène de Vincente Minnelli, comment la technique accomplie des danseurs (Fred Astaire et Cyd Charisse), loin de se
suffire à elle seule, peut soutenir l'incarnation d'un geste de plasticien coloriste ayant la préoccupation de problématiser et d'excéder les formes hollywoodiennes, tiraillées alors entre
l'injonction incontournable au divertissement populaire, le piège de l'annexion culturelle et le désir de l'art malgré tout.
Dans notre catégorie des autres textes consacrés au cinéma, c'est une passe de quatre petits essais qui sera proposée, investissant quelques propositions aussi hétérogènes qu'elles manifestent en
ses expressions éparses un divers propre au cinéma.
L'on verra par exemple comment Jean-Louis Comolli, en compagnie de fidèles complices (le journaliste Michel Samson et l'opérateur Jean-Louis Porte), tous participants avec
Marseille entre deux tours d'un intellectuel collectif et pratique, indique en guise de conclusion ouverte à un quart de siècle
d'enquêtes documentaires sur la vie politique locale marseillaise que la vraie vie, peut-être, est ailleurs - par exemple dans les champs de réinvention d'une ville à vivre essayée, au risque
d'une croyance cependant problématique de voir dans la culture un salutaire substitut aux désappointements militants.
En défi à toutes les lois et chronologies, on verra aussi Manoel de Oliveira imposer un an après sa disparition une actualité drôlement revenue de 1982, quand alors il imaginait avec
sa
Visite différée d'une maison sur le point d'être abandonnée l'occasion, certes posthume mais non testamentaire, de dire de quel bois
multiséculaire il est fait comme de demander au spectateur d'aujourd'hui de le regarder avec un futur ignoré de lui.
On verra encore comment la disparition soudaine de l'actrice et réalisatrice
Ronit Elkabetz fait surgir la figure d'une fée Viviane d'aujourd'hui, ténébreuse sorcière du cinéma contemporain (israélien mais pas que)
au sens où, contre tous les procès instruits à l'encontre des femmes remuant dans les brancards de l'hétéronomie, elle aurait été détentrice de quelques beaux tours de magie grise appris dans une
drôle de forêt de Brocéliande, judéo-arabe.
On verra enfin comment les belles promesses comme des cerises ramassées dans les premiers courts-métrages de
Sarah Hatem proposent d'inventer, à l'endroit où la massivité architecturale s'expose en imposant la fragilité de ses défauts, des jeux
d'enfance pour l'enfant que la jeune adulte n'est plus - autrement dit des manières d'être poétiques, des écritures cryptiques, des danses impromptues et des musiques pour une légèreté
reconquise, relevée en défi à toutes les inerties.
Enfin, notre
sélection musicale fera la part belle aux croisements des hétérogènes,
les imprécisions entre foirade et expérimentation des Shaggs se cognant aux tronçonnages de métal massif de Rammstein pour Lars von Trier, tandis qu'une transe mi-africaine mi-celtique revenue de
Gangs of New York s'enroule dans
les boucles de pop éthéré de Beach House
et les déliés post-rock de Broken Social Scene.
En ces jours contrastés où le temps est certes pourri mais la météo sociale chaudement favorable à la contestation populaire d'un gouvernement s'échinant à vouloir bloquer et diminuer la
puissance d'agir du salariat, se faufilera la (déjà !) 20ème
newsletter des nouvelles du front (
site
et
facebook).
Dans la catégorie des
Nouvelles du front cinématographique : après avoir proposé un voyage en deux stations à travers une brève histoire du
musical hollywoodien, les Philippines se seront imposé à nous grâce à la découverte d'importance de quelques films de Lav Diaz. C'est, avant
un texte consacré à
Norte - La fin de l'histoire, le chant de la terre meurtrie résonnant depuis les neuf heures hypnotiques de
Death in the Land of Encantos afin de faire parvenir les
tremblements volcaniques d'une histoire plusieurs fois tourmentée ayant plissé dans le lit tectonique des plans d'inédites profondeurs de champ et de temps.
Dans notre catégorie des
autres textes
consacrés au cinéma, nous vous proposons deux textes aussi différents concernant leurs objets que complémentaires en ce qu'ils font la critique des formes cinématographiques préoccupées des
fronts de la guerre civile mondiale disséminés le long de la ligne de fracture partagée par le Proche-Orient et l'Asie centrale.
D'un côté, avec
L'Afghanistan, raté deux fois, nous proposerons de discuter de la manière dont la question de la présence militaire française en
Afghanistan est redéployée par deux fictions caractéristiques des hésitations du jeune cinéma français contemporain (
Maryland
d'Alice Winocour et
Ni le ciel ni la terre de Clément Cogitore) qui, s'ils ambitionnent d'inscrire la question dans une approche
intellectuelle ou conceptuelle du cinéma de genre, en tirent des conséquences inégales et quelquefois inconséquentes politiquement.
De l'autre, nous verrons avec
Searching for Hassan de Édouard Beau que d'autres dispositifs cinématographiques, certes moins médiatisés mais autrement plus
risqués aussi, sont possibles dès lors que l'immersion documentaire au sein d'une unité kurde de l'armée irakienne sait à la fois restituer l'expérience vécue d'une pratique de l'ordre
ambivalente et la phénoménologie d'une journée caractéristique de l'état d'exception devenu la règle de la région.
En guise de raccord, notre
bon plan du mois se focalisera sur
d'autres films de ce même
cinéaste-photographe découvert au Festival Hors Piste au Centre Beaubourg. Par exemple ce beau diptyque constitué des courts-métrages
Archéologies et
Mémoires d'empires, puissantes images dialectiques
faisant voir dans Wall Street le signe clivé d'une puissance (économique) et d'une impuissance (sociale) et dans Mossoul depuis prise par Daech le souvenir fossile persévérant à travers les
millénaires de Ninive, empire qui se savait à la fois mortel et immortel.
A l'occasion de l'actuelle grande rétrospective intégrale consacrée aux film de
Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, nous consacrons notre
séquence du moment au récent court
A propos de Venise, petite bombe qui
amorce la permanence (via la figure de Maurice Barrès) du discours réactionnaire et décliniste pour le faire exploser à grand coup d'accords joyeusement anarchiques et éoliens, retentis de
l'immortel Bach-film pour entrer aujourd'hui en court-circuit avec la grande colère sociale actuelle.
En attendant également le festival
Côté court de Pantin du 15 au 25 juin prochains, on remettra avec joie les yeux dans les films de
Yassine Qnia (
Fais croquer, Molii et
F430) et
Soufiane Adel (
Vincent V. et
Go Forth), les films des deux gaillards y étant sélectionnés.
Enfin, notre
sélection musicale témoignera de quelques beaux accents :
- mélancoliques chez Swell et Elliot Smith avec leurs morceaux respectifs Oh My My et Angels ;
- mélangés entre celtique et Afrique avec le Bagad Men Ha Tan dont le titre Rohan est utilisé à la fin du sublime The Assassin de Hou Hsiao Hsien ;
- nostalgiques avec une musique soul entendue dans la série télévisée Lost : Dharma Lady des peut-être fictifs Geronimo Jackson ;
- saccadés avec le groupe Why ? et leur morceau entre pop et hip-hop Jonathan's Hope.