Pourquoi des nouvelles du front ? C'est déjà une vieille histoire, cinq années anarchiques au cours desquelles un blog aura bien voulu accueillir amicalement des essais d'écriture (comme autant d'essais d'ouverture) consacrés aux films regardés selon une logique qui voudrait conjuguer, au risque assumé de l'autodidaxie sauvage, l'exigence et le plaisir (celui du texte placé sous l'exigeante condition du désir d'excéder par l'analyse l'impressionnisme critique dominant le traitement des films sur Internet).
C'est désormais, depuis la constitution d'un site présentement autonome et spécifique, la persévérance dans le refus de ne pas céder au désir d'affirmer la permanence d'une triple question de littérarité, de temporalité et de conflictualité.
Écrire sur le cinéma (essentiellement, mais pas seulement), c'est d'abord apprendre à écrire en désir d'un lecteur inconnu à qui il s'agirait de s'adresser malgré tout, depuis la nébuleuse électronique et bruyante des réseaux hypertextuels. C'est ensuite pousser la notion médiatique de l'actualité au-delà de sa réflexologie habituelle, les œuvres d'aujourd'hui étant considérées avec le même œil que celles d'hier, les césures de l'hier et de l'aujourd'hui finissant par s'articuler au nom d'une temporalité sans hiérarchie et qui n'appartient qu'au contemporain, résolument. C'est enfin considérer que l'écriture analytique et critique consacrée entre autres aux formes cinématographiques s'inscrit à l'intérieur d'un régime de conflictualité concernant tout le champ social, en particulier la production des visibilités et la manière dont elles caractérisent les lignes du front partageant le sensible.
Avec la conjonction de l'esthétique et de la politique, se pose donc l'affirmation d'une nécessité de tenter de penser les images à l'endroit même (le cinéma) où elles seraient paradoxalement, à la fois les plus faibles peut-être (en termes de rapports de force faisant l'actuel capitalisme en son versant culturel et médiatique) et peut-être aussi les plus fortes (en promesses de sensibilité, de pensée et d'émancipation).
Et il n'y aurait là rien de moins politique dès lors que l'on refuse de cantonner, ainsi qu'y travaille par ailleurs la doxa, les choses (cinématographiques) de la sensibilité et de l'esprit dans les marges de luttes qui, où qu'elles se produisent, ne le font que depuis l'esprit et la sensibilité de ses acteurs et de ses actrices.
Donc, des nouvelles du front, comme autant de prises de positions. Parce que la guerre des esprits, des visibilités et des sensibilités ne cesse tous les jours d'avoir lieu en requérant chacune
et chacun, à leur corps défendant, d'occuper une place qui, si elle n'est pas systématiquement souhaitée, peut être également objet de déplacement et de réappropriation. Des nouvelles du front
cinématographique principalement, mais pas seulement. C'est aussi une constellation hétérogène de notes de lectures d'ouvrages appartenant aux champs de la sociologie et de l'histoire, de la
littérature et de l'économie ainsi que des interventions critiques rapportées aux symptômes idéologiques (quand ils trahissent les mouvements de l'hégémonie) ou politiques (quand ils traduisent
une résistance face à cette dernière).
Et même, pourquoi pas, quelques essais de montage en guise de travaux pratiques.
Des nouvelles du front donc, en forme de réponse modeste et ambitieuse de quelques puissances subjectives acharnées à ne pas être subsumées sous la coupe des pouvoirs existants, avec leur lot de supports techniques, technologiques (et même présentement télé-technologiques). Des singularités quelconques et persévérantes composant un agencement collectif d'énonciation afin de tramer des processus de subjectivation soucieux de ne pas être en reste ou mis en demeure par les forces d'assujettissement qui s'ingénient à les contrarier à chaque instant.
Il va s'en dire, enfin, que les textes disponibles ici, soumis aux repentirs d'une écriture interminable, sont libres de citation dès lors que leurs auteur-e-s et le présent site duquel ils auront été cités soient nommément respectés par les commanditaires de ces bandits de grand chemin surgissant brusquement afin de dépouiller le lecteur de ses ultimes convictions, ainsi que l'écrivait Walter Benjamin dans Sens unique.
Le 8 décembre 2014
nota bene : Des Nouvelles du Front est un site dont la politique est celle de l'amateur. Nous partageons avec nos lectrices et nos lecteurs nos analyses tout en gardant à l'esprit le respect des droits d'auteur. Nous utilisons ainsi pour chaque article des images non pas dans un but d'exploitation commerciale mais toujours dans le souci de la libre pensée que les œuvres auront ici suscitées.
Nous nous engageons donc à retirer immédiatement les illustrations dont nous ne possédons par les droits sur la demande expresse des ayants-droits. N'hésitez pas à nous contacter à la page suivante : contact.
Nouvelles 296 et 297 : Le mauvais démiurge sourcilleux (Henri-Georges Clouzot)
Nouvelles 295 : Estivales documentaires
Nouvelles 294 : Échanges en cinéma sur les terres battues de Méditerranée
Nouvelles 293 : La Zerda et les chants de l'oubli d'Assia Djebar (le cinéma, la fantasia)
Nouvelles 292 : L'en-pire de Bruno Dumont
Rêver à la Suisse de Nicolas Leclere : On ne saurait penser à rien
Diaries of Lebanon de Myriam El Hajj : Battre des langues et des pieds
Le 6 juin à l'aube de Jean Grémillon : De la conquête
Mon coursier hors d'haleine de Christophe Clavert : Des genêts sur l'herbe
Challengers de Luca Guadagnino : L'empire de la séduction
North By Northwest d'Alfred Hitchcock : Fondus et enchaînés (une énigme de sphinx)
Barbie de Greta Gerwig : Le rose est une couleur froide
De nos jours... de Hong Sang-soo : Le chat tout gras et le vieux qui boit
Au-delà du réel de Ken Russell : Big Bang électronique
A pas aveugles de Christophe Cognet : On n'y voit mais
L'Armée des ombres de Jean-Pierre Melville : Vivre en Immortel et puis mourir
Vieilles chansons géorgiennes et Euskadi d'Otar Iosseliani : Fredon et fredaines
L'Ordre de Jean-Daniel Pollet : Dis, Raimondakis (celui d'en face)
Profession : reporter de Michelangelo Antonioni : L'air de rien, la tauromachie
Le Jardin qui bascule de Guy Gilles : Plus belle qu'une balle (dans le cœur)
Paul Schrader, la morale obscure et l'éthique qui l'éclaircit
Bush à bush (Bushman de David Schickele et Bush Mama de Hailé Gerima)
Dormir en Corée (Walk Up de Hong Sang-soo et Sleep de Jason Yu)
(L'Aventure de madame Muir de Joseph Mankiewicz et Le Salon de musique de Satyajit Ray)
L'exception et faire sécession (Knock at the Cabin de M. Night Shyamalan et La Montagne de Thomas Salvador)
Une scène détestée dans un film aimé
Une scène aimée dans un film qui l'est peu
Les plus belles paroles d'amour
Peter Sloterdijk, Le Remords de Prométhée : Pyrotechnie pour le pire
Accueillir de Marie José Mondzain : Phraternellement
Les Généreux d'Abdelkader Alloula : Les immortels de l'Algérie nouvelle
Garder le silence, contre tout malentendu (Camus, le cinéma et The Leftovers)
Éden, Éden, Éden de Pierre Guyotat : Chants de mal et d'horreur
Larmes de joie de Mario Monicelli : Le miracle entre les miracles
Kinds of Kindness de Yorgos Lanthimos : Et in Arcadia ego
L'Homme sans âge de Francis Ford Coppola : La troisième rose, la dernière, la trémière
Cotton Club de Francis Ford Coppola : Double-croches et croche-pattes, du blanc sur le noir
C'est pas moi de Leos Carax : Itinéraire d'un enfant gâté
John Carpenter (numéro 71, décembre 2022)
Paul Thomas Anderson (numéro 70, juillet 2022)
Claude Chabrol (numéro 69, décembre 2021)
Bong Joon-ho (numéro 68, juin 2021)