David Fincher

"Écriture psychotique, lecture paranoïaque" in David Fincher : Simulacre et Réalité (numéro 51, décembre 2012)

Approche transversale

 

La figure paradigmatique du tueur en série est celle qui peut aider à considérer, puisqu'elle est récurrente et structurante dans le cinéma de David Fincher, le tracé propre de la trajectoire esthétique jusqu’à aujourd’hui accomplie. Seven (1995), Zodiac (2007), Millenium (2011) bien évidemment, mais pourquoi pas déjà Alien 3 (1992), ce premier long métrage alors dénigré par son jeune réalisateur (né en 1962) qui n'avait pas encore atteint comme aujourd'hui sa stature de réalisateur hollywoodien High-tech aussi incontournable que Darren Aronofsky (né en 1969) et Christopher Nolan (né en 1970) : à chaque fois donc le serial killer ouvrirait l'espace d'une reconfiguration du régime figuratif et représentatif dominant l’industrie hollywoodienne.

 

Précisément, la reconfiguration consistera en l’exposition littérale d’une réécriture de ses codes justement au nom de la surdétermination du motif de l’écriture considérée comme code (encodage et programmation). C'est d'ailleurs à cette aune que David Fincher a su se saisir originalement de la figure médiatiquement rebattue du tueur en série. Envisagé comme producteur de discours incisés à même la peau du réel, le serial killer produit son rapport au monde sur le mode psychotique d’une mise en scène meurtrière et sérielle qui soutiendrait la rédaction compulsionnelle de phrases dont les mots seraient faits de cadavres, et l'encre de sang.

 

Plus précisément, le tueur en série incarnerait chez David Fincher, et jusqu'à son point d'indistinction machinique, la fusion entre la fuite pulsionnelle au nom d'une irrépressible, asociale et diabolique jouissance, et l'invention de systèmes symboliques justifiant la série sanglante et signifiante de cadavres disséminés. Puisque l’horizon social est structuralement ici réduit à celui de la communication, le tueur en tant qu’émetteur autoriserait donc un autre que lui à s’établir comme récepteur susceptible de décoder ou décrypter le message encodé ou encrypté par ce dernier. Alors, les écritures meurtrières du serial killer (en abscisse)et les exégèses de leurs interprètes paranoïaques (en ordonnée) déterminent des quadrillages qui peuvent autant induire les scénarios cryptés de Se7en et The Game (1997) que l’énigme intérieure divisant le personnage schizophrène de Fight Club (1999).

 

Avec Zodiac puis Millenium : The Girl With A Dragon Tattoo (2011), le metteur en scène surmonte la fascination terrifiée pour le serial killer, autrefois son double obscur, son frère diabolique, sa « part maudite » (Georges Bataille), pour se reconnaître désormais dans la folie autrement plus troublante peut-être de son paranoïaque herméneute.

 

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