Par où commencer ? Quelle route emprunter pour traverser la forêt ? Comme l'écrivit un jour Antonio Machado, le chemin (la sente comme le poète dit) est celui que s'invente pas à pas le marcheur. Alors, une fois n'est pas coutume, on s'avancera à travers les arbres en s'arrêtant sur quelques images suggestives d'une bande-annonce, celle du prochain film de Ghassan Salhab intitulé La Vallée. Le sixième long-métrage (le cinquième en fiction) du cinéaste libanais réalisé en 2014, et montré depuis dont divers festivals (entre autres le Festival international du film de Toronto, les Journées Cinématographiques de Carthage où nous l'avions manqué et le Festival international du film de La Rochelle), est toujours en attente d'une distribution dans les salles françaises, promise pour le début de l'année prochaine, peut-être.
« Je suis originaire d'une famille ouvrière et je me sens, en cet instant même, à la fois proche et éloigné de ma classe d'origine » pouvait écrire le sociologue anglais Richard Hoggart dans The Uses of Literacy originellement paru en 1957 et publié treize ans plus tard en France sous le titre fameux de La Culture du pauvre (sous-titré Étude sur le style de vie des classes populaires, éd. Minuit-coll. « Le sens commun », 1970, p. 42).
Broadway, qui vient à l'origine du hollandais « Brede Weg » signifiant « avenue large », est la plus vieille avenue située sur l'axe nord-sud de la ville de New York, traversant l'île de Manhattan sur plus de 20 km et datant même d'avant les premiers colons puisqu'elle recoupe en fait le tracé emprunté à l'époque précolombienne par les Amérindiens qui l'appelaient alors « Wickquasgeck ». Les grands défilés s'y sont historiquement déroulés, les « Ticker-Tape Parades » mélangeant depuis l'inauguration de la Statue de la Liberté en 1886 les confettis et serpentins aux bandes découpées des téléscripteurs.
Il en faudrait – mais quoi ? De la durée déjà, en ce qu'elle autoriserait tout à la fois de ralentir la marche des récits en y creusant un relâchement décisif dans l'impératif des enchaînements narratifs. Avec la distension dès lors combinée avec l'étirement de la matière sensible des plans, ceux-ci seraient d'autant plus riches qu'ils seraient ouverts sur une profondeur de champ telle qu'elle accueillerait virtuellement toute l'histoire tourmentée du pays (les Philippines) ainsi que sa géographie qui, parcellaire et archipélique, n'en serait pas moins tourmentée elle aussi.
C'était en 1999, deux road-movies documentaires ignoraient se répondre d'est en ouest, témoignant cependant, par-delà plusieurs milliers de kilomètres de distance séparant leurs lieux de tournage respectifs, d'une immense croyance partagée dans ce que peut l'art du cinéma dès lors que de l'humain y est en jeu. Dans Sud de Chantal Akerman, une route campagnarde du sud des États-Unis déroulait dans la ponctuation des taches mortifères d'un ruban de bitume la preuve que l'espèce humaine avait une nouvelle fois reculé, universellement mortifiée dès lors que les traces presque invisibles du massacre d'un seul homme noir traîné par une voiture et déchiqueté nous affectaient tous sans plus jamais devoir cesser d'exercer leurs effets, obligeant à nous découvrir alors un peu moins vivants.
Ghibli, c'est, outre une fameuse mascotte (l'esprit légendaire de la forêt Totoro, créature à mi-distance de l'ours et du chat), un nom qui ne l'est pas moins, venu du côté de Hayao Miyazaki et d'un amour de l'aviation (le Caproni Ca. 309 Ghibli était un monoplan bimoteur utilisé par l'armée italienne durant les années 1930) hérité d'un père aviateur ayant lui-même piloté un avion de ce modèle (mais Ghibli vient encore de plus loin puisqu'il dit l'équivalent arabe du sirocco, ce vent saharien très sec et chaud soufflant violemment en Afrique du nord).