Nouvelles du Front de 181 à 190

  • Nouvelles 181 : La tranchée des archives (L'Héroïque cinématographe d'Agnès de Sacy et Laurent Véray et Premier Noël dans les tranchées de Michaël Gaumnitz)

 

Dans Mal d'archive, une impression freudienne (éd. Galilée, 1995), Jacques Derrida pose la question de l'archive en la reposant à nouveaux frais sous la condition psychanalytique de la hantise, en excès à la seule définition de l'archive considérée comme le corpus institué pour la conservation des traces matérielles du passé, qu'elles soient écrites ou graphiques, sonores et visuelles.

 

  • Nouvelles 182 et 183 : Festival Entrevues de Belfort, 33ème édition (première et seconde partie)

 

Le cinéma est moins une thérapie de groupe que son art prend soin du spectateur, un par un. Le cinéma prend soin en particulier des blessures dont on ne guérit jamais, comme la blessure de vivre confondue avec celle du mourir. En ces temps mélangés d’avachissement démocratique, de fièvre réactionnaire et d’abêtissement médiatique, on peut encore aller au cinéma pour retrouver un peu de force et fourbir des armes, pour y revoir ou découvrir des films qui prennent soin de nous parce qu’ils prennent soin du monde qu’ils redonnent avec la croyance allant nécessairement avec.

 

  • Nouvelles 184 : Tahia ya Didou !, Z comme Zinet

 

Une ribambelle d’enfants en file indienne déboule à toute vitesse en descendant les marches d’un escalier rampe sur rampe du centre populaire d’Alger. Redouane est le dernier d’entre eux et le plus petit de la bande. Ce gamin rieur et mutin à la chevelure blonde et bouclée est comme un lutin espiègle, c’est un feu follet, une flammèche qui court après la mèche d’une enfance explosive, le petit porteur luciférien d’un prénom dont l’origine arabe – rida signifie la satisfaction.

 

  • Nouvelles 185 : Une rose ouverte de Ghassan Salhab

 

Quoi qu’en dise la chanson populaire, ici, Rosa ne s’associera pas au plus vieux tango du monde, celui des têtes blondes, des forts en thèmes et du temps des zéros. Rosa ne nommera pas la rengaine latinisante des enfances piquées au vif par les épines de l’ordre scolaire, mais la ritournelle qui redonne du rose aux joues flétries par les morsures du temps.

 

  • Nouvelles 186 : une rose éclose des blessures, Cent visages pour un seul jour de Christian Ghazi

 

Une grille vient comme les doigts d'une main barrer la visibilité pleine et entière du champ – un champ moins de cultures que de ruines strié de plis noirs, un champ moins sillonné que plié, creusé de tranchées d'ombres. Off, la voix d'une femme évoque dans la langue politisée de la militante l'échec des forces armées arabes depuis 1967, demandant notamment à réfléchir à la prévalence structurelle des causes internes sur les causes externes dans l'explication d'une impasse qui n'aurait jamais depuis cessé de durer.

 

  • Nouvelles 187 : Sous la plage, un ossuaire (Agnès Varda, brocanteuse de l'humanité)

 

Ce n'est pas seulement qu'Agnès Varda aura beaucoup aimé les enfants, qui peuplent tout son cinéma comme une multitude généreuse et inventive, comme un poudroiement vital et dispersif dont l'élan écumant aura soufflé en se déposant jusque dans son propre corps. C'est qu'il y va avec eux d'une enfance dont Agnès Varda aura été la persévérante gardienne, avec une constance et une endurance courant rien moins que sur sept décennies.

 

  • Nouvelles 188 : Beyrouth, de l'aube à l'aube (retour à l'ALBA)

 

Il y a deux ans, il n’y avait rien d’autre à souhaiter que ceci : que l’ALBA, l’académie libanaise des beaux-arts, tout particulièrement son école de cinéma, poursuive en tenant les belles promesses printanières portées par la première édition des « ciné-rencontres » en 2017 (cf. Saad Chakali, « À l’aube de Beyrouth. Quelques jours à l’ALBA » in Trafic, n°103, automne 2017, p. 30-39). C’est désormais chose faite avec une seconde édition qui a eu lieu entre le 9 et le 12 avril 2019, dont le titre générique est : « 1975-1990 filmer en temps de guerre au Liban ».

 

  • Nouvelles 189 : La radicalité à la racine (André Téchiné, frères Dardenne, Mohamed Ben Attia)

 

On entend sous le terme générique de radicalisation le processus social par le biais duquel un individu, souvent jeune, décide de s'engager dans des formes d'activisme politique ou religieux allant jusqu'à l'extrémisme homogène au narcissisme des causes perdues décrit par Jacques Lacan.

 

  • Nouvelles 190Tlamess d'Ala Eddine Slim, l'appel de la forêt

 

Tlamess ouvre ainsi ses paupières noircies de khôl : la nuit est magnétique, constellée de ponctuations clignotantes et électrisée d’éclairs, et sur son front troué luit une lune laiteuse sous l’œil de laquelle des soldats franchissent un gué. L’orage est d’ailleurs si fort qu’il sépare pour chacun d’entre eux le blanc du noir des yeux, parmi lesquels celui de l’acteur principal, le musicien égyptien Abdullah Miniawy.