Champ-contrechamp de 11 à 20

 

Le retour du personnage de Luke Skywalker était bien ce que tous les fans, de la première à la dernière heure, attendaient avec une impatience piquée d'angoisse en découvrant enfin le tant attendu Star Wars : Episode VII – The Force Awakens en 2014.

 

 

Deux contes de fée qui partagent un bel accent portugais et une écriture à quatre mains encadreraient idéalement l'année 2018, mais c'est pour mieux diviser l'esthétique carnavalesque de la postmodernité. Pour le pire où le bain moussant du pastiche liquide les intentions politiques dans le filet d'eau tiède du kitsch, pour le meilleur où le mélange des genres sait réfléchir au caractère monstrueux de la forclusion d'une créolité fondatrice. Diamantino de Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt est ce champ cultivant l'inconséquence de l'exubérance kitsch dont le contrechamp davantage conséquent et critique aura pour nous été plus tôt donné dans l'année avec Les Bonnes manières de Juliana Rojas et Marco Dutra.

 

 

Les deux premiers long-métrages de Jordan Peele le montrent avec des résultats inégaux mais toujours intéressants : le cinéma d'épouvante hollywoodien des années 1970 et 1980 offre les formes contemporaines en capacité de sonder les cauchemars contemporains d'une Amérique malade du refoulement de la conflictualité sociale, pour peu seulement que le noircissement de ses figures en révèle la symptomatique « blanchité ».

 

 

Il y a le droit qui organise et formalise une certaine idée de la justice indexée sur une autorité souveraine et il y a une justice sans droit, indécidable, incalculable au point d'excéder dans la folie de sa décision la norme du droit lui-même.

 

 

L'apothéose était à grand renfort publicitaire promise pour Avengers : Endgame, suite directe et second volet de Avengers : Infinity War (2018), 22ème film de l'Univers Cinématographique Marvel (MCU) ouvert avec le premier volet des aventures de Iron Man (2008) et dixième opus de la phase III entamée avec Captain America : Civil War (2016).

 

 

Des guerres colombiennes - guerre civile, cartels de la drogue - et des films pour en témoigner en montrant que, à l'écart des clichés ou à rebrousse-poil des stéréotypes, les déchirures ont aussi leurs fantômes et leurs mythes, leurs images ancrées : l'inégal Les Oiseaux de passage des colombiens Ciro Guerra et Cristina Gallego sur le versant croisé du film de genre et de l'ethnographie, et le fantastique Los Silencios de la brésilienne Beatriz Seigner du côté de l'inscription documentaire débouchant sur le réalisme magique.

 

 

À chaque fois, Ari Aster reconnaît donc dans la mystique païenne accompagnant de vieilles formes communautaires la métaphore romantique d'un art de la représentation comme processus élitaire, électif et distinctif, qui sanctionne les mauvais pour célébrer les meilleurs, avec leur couronnement comme ce moment extatique et décisif où la consécration avère son caractère aristocratique. Le nouveau roi de l'horreur est nu et la nudité dévoile un roitelet réactionnaire qui, parce qu'il a lu Georges Bataille et Friedrich Nietzsche, se croit fallacieusement anarchiste couronné.

 

  • Mindhunter saisons une & deux : L'horreur de plus près

 

C'est qu'avec Mindhunter, il s'agit rien moins que de remonter à l'origine du travail entrepris à la fin des années 1970 pour l'émergence scientifique et la reconnaissance institutionnelle d'une catégorie criminologique nouvelle (le serial killer) dont les fonctions cognitives, induites par une nouvelle méthode de profilage redevable des sciences comportementales, se prolongent en effets pratiques permettant d'identifier plus rapidement les tueurs en série qui relèvent de cette nomination, voire en effets préventifs interrompant la série possiblement inaugurée par un premier meurtre.

 

 

« Peut-on filmer un ''ennemi'' aujourd'hui sans utiliser les méthodes si souvent dénoncées de la propagande, en évitant la caricature ou la ''diabolisation'' de l'adversaire ou de l'ennemi ? ». La question formulée par Catherine Blangonnet a été posée en frontispice d'un numéro important de la revue Images documentaires (n°43, quatrième trimestre 1995, p. 3). La question s'est toujours posée, elle n'a pas dans les faits cessé de s'imposer à des réalisateurs aussi différents que Charlie Chaplin et Marcel Ophuls, Werner Herzog et Claude Lanzmann, Rithy Panh et Barbet Schroeder. Même si l'on sait aussi que les réponses en fiction diffèrent de celles du cinéma ressaisi sur son versant documentaire. Ne serait-ce que parce que, dans le second cas, la part du réel y est aussi forte, voire davantage que celle recouverte par le champ de la représentation pour le premier cas.